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Dévoiler la pépite de votre personnage: utilisez un détecteur de métaux!

Hello les écrivains!

J’aimerais vous parler d’une astuce pour trouver la pépite au cœur d’un personnage et le rendre plus profond. En effet, cela arrive parfois. On a beau passer des heures sur une fiche personnage, avoir suivi son héros pendant tout un roman, croire qu’on le connaît mieux que sa mère et pourtant… un lecteur nous dira: « Je sais pas, il ne m’a pas touché, je le trouve creux…». Ouch! Ça fait mal. Alors on passe quelques heures de plus sur sa fiche personnage, on creuse un peu n’importe où. Et cela ne marche toujours pas. Parce que l’on ne sait pas où chercher. Si au lieu de cela, on creuse au bon endroit, au contraire, on peut trouver la pépite et créer des personnages profonds qui intrigueront le lecteur. Disons qu’en combinant plusieurs méthodes d’écriture, j’ai fini par trouver un détecteur de métal qui permet de dévoiler cette pépite! Alors creusons!

une pelle de dessin animé plantée dans la terre, une métaphore de comment creuser une fiche personnage
OpenClipart-Vectors / Pixabay

Le principe alchimique

Le principe derrière ce détecteur de métal est lié à ce que recherche un lecteur quand il suit un personnage de fiction. Finalement, les personnages sont des avatars qui nous permettent de nous projeter dans une autre façon de voir le monde. Que cherchons-nous? À comprendre comment nous réagirions dans cette situation, à comprendre ce que nous sommes et surtout, ce que pensent les autres et pourquoi ils agissent comme ils le font.

C’est en rencontrant Elizabeth George, du moins, sa méthode d’écriture, que j’ai compris qu’il manquait quelque chose d’essentiel à mes fiches personnages: la pépite qui les anime, en bien ou en mal, la pépite qui les tort et qui fait d’eux ce qu’ils sont. Elle appelle cela le «besoin central». Et si vous lisez les enquêtes de son inspecteur Lynley (lui, je l’aime, remarque inutile je sais ^-^), vous verrez à quel point ses personnages sont terrifiants de réalisme. Robert MacKee, un méthodiste d’Hollywood parle de vrai caractère. Vogler lui, parle de besoin inconscient. Lisa Cron, une autre écrivaine qui a inventé une méthode d’écriture, s’attache au «conflit intérieur». Deux notions complémentaires pour un même objectif. Je l’appelle la pépite.  Mais pour la déterrer, il faut parfois creuser profond. D’où, le détecteur de métal et la méthode que je vous propose ci-dessous 😉

Le recette alchimique

L’outil de base pour creuser est la fiche personnage bien sûr. La base est de partir d’une graine de personnage lié au besoin de l’histoire puis de le creuser pour dévoiler son vrai caractère, ce qui nous donnera une première idée de la pépite qu’il renferme.  À ce stade, on peut enfin se poser des questions utiles mais pas fondamentales comme «d’où il vient», «à quoi il ressemble»: c’est la caractérisation. Vrai caractère et caractérisation seront le terreau qui permettra de faire pousser la graine. On peut alors réfléchir à sa construction, comment il a grandi pour devenir ce qu’il est. Cela permet d’affiner la pépite. Une fois qu’on connaît intimement notre personnage, on pourra comprendre comment il réagit, c’est ce que je nomme l’incarnation, ce qui le rendra vivant au jour le jour. Enfin, on peut revenir à l’histoire et s’interroger sur les scènes qui seront utiles dans l’intrigue: c’est les éléments dramatiques. Je décris ici et dans les prochains articles les grandes lignes de chacune de ces étapes. J’y reviendrais ne vous inquiétez pas!

Fiche personnage Étape 1: La graine, où le germe sur lequel se fera la cristallisation

une main d'enfant donne une graine de lumière à un autre enfant. Métaphore de la pépite au cœur du personnage
oui encore, j’adore cette image

L’idée est ici de réfléchir au thème de l’histoire. Que voulez-vous dire? Qu’est-ce qui vous tient à cœur? Quel principe souhaitez vous illustrer? En quoi votre personnage résonne avec ce thème? Par exemple, si votre histoire parle de la rédemption, peut-être votre personnage sera-t-il un «pêcheur» qui ne se pardonne pas ce qu’il a fait, ou un «soigneur» qui aide les autres à devenir meilleur. Quel est son défaut? En quoi doit-il changer? C’est là le germe du personnage. Avant même de savoir la couleur de ses yeux, son statut social, et même, si c’est un homme ou une femme. Que représente-t-il dans votre histoire?

Fiche personnage Étape 2: Dévoiler son vrai caractère, ou déterrer sa pépite cachée

Ainsi, demandez-vous ce que veut votre héros du fond du cœur. Essayez de visualiser des choses concrètes. Écrivez aussi son ambition ou à quoi ressemble le parfait bonheur (utilisez des choses concrètes). Quelle serait la pire chose qui pourrait lui arriver?

Christopher Vogler, un script doctor d’Hollywood pense que les histoires sont des fées qui exaucent les vœux. Mais d’une façon parfois taquine, voire cruelle. Pourquoi? Car le vœu conscient du héros est parfois à l’opposé de son «vœux inconscient», son besoin véritable. L’histoire lui montrera son erreur.

Demandez vous maintenant quelles sont les limitations, les blocages, qui empêchent votre héros d’avancer? Bref, quel est son «conflit intérieur» si cher à Lisa Cron. À partir de ce conflit, Lisa s’interroge sur les raisons qui ont créé ces limitations: problème comportemental mais aussi ses préjugés. Elle appelle cela «l’erreur dans sa vision du monde». D’où vient son erreur? Pourquoi voit-il le monde ainsi? Quel est son démon qui l’empêche d’obtenir ce qu’il veut et quand ce démon est-il né?

Basculons maintenant sur la méthode d’Elizabeth George. Vous devez connaître à ce stade quel est son plus grand besoin. C’est ce que Elizabeth George appelle le «besoin central». C’est souvent dû à un pathos, un manque, un problème affectif ou  psychologique. Comment réagit-il lorsque son besoin central est frustré? Cela n’est pas forcément positif. Le besoin central d’un pervers est de rétablir son narcissisme blessé. Cela se traduit par un besoin de dominer les gens, de les abaisser pour les mettre en son pouvoir.

Cela vous semble extrême? Pourtant… On n’est pas tous des pervers mais on a tous des moments où on a envie de dominer. On n’est pas tous schizophrènes mais on est nombreux à ne pas réussir à faire taire cette petite voix qui analyse nos émotions. Et ce sont aussi ces légers problèmes qui font de nous ce que nous sommes. N’hésitez pas à vous documenter sur les différents troubles mentaux, Elizabeth a fait des études de psychologie!

Petite question que je me pose toujours à ce stade, c’est «Comment le soigner?». Ces trois mots me donnent la plupart de mes plans en romance. Votre pervers narcissique a peut-être juste besoin de retrouver un attachement sécurisant. Il y aura des étapes qui lui permettront de changer (enfin, l’exemple n’est peut-être pas très judicieux, j’ai lu des études qui disent que ces bestioles ne changent jamais…).

La pépite, vous l’aurez compris, est un mélange de conflit intérieur et de besoin central et inconscient. Il ne reste plus qu’à en faire une pièce rutilante 😉

PIX1861 / Pixabay

Fiche personnage Étape 3: Le caractériser, ou verser du terreau

Maintenant que vous avez déterré la pépite, vous pouvez vous poser LA question que l’on voit dans toute bonne fiche personnage: «A-t-il les yeux bleus comme la mer des caraïbes?» *-* Bon, je ne m’éterniserais pas mais bien sûr, il faut aussi s’intéresser à ce qu’il y a à l’extérieur. C’est ce que Robert MacKee nomme la «caractérisation» et que j’appelle la fiche personnage bateau. Pourtant, cette partie est importante aussi: À quoi ressemble-t-il? De quel milieu social est-il, quelle région? Son signe astrologique, etc. On peut s’aider d’une photo ou de personnages existants fictifs ou réels.

Cette partie peut paraître n’être qu’un aide mémoire pour l’écriture. Mais attention, ces questions externes de la fiche personnage peuvent ne pas être triviales! Avoir les yeux bleus ou la peau noire, être homme ou femme, riche ou pauvre, cela a un impact sur la manière dont le monde nous traitera. Choisissez-les biens. Inconsciemment, on a déjà une idée du terreau qui donnera la fleur, il faut toujours chercher à lier le fond et la forme, le contenant et le contenu.

Les autres étapes

Nous avons maintenant la pépite, nous avons le terreau, il ne nous reste plus qu’à observer comment tout cela va pousser! C’est ce que nous ferons dans les prochaines étapes de la fiche personnage:

  • Étape 4: Observer sa construction, ou le voir grandir pour mieux le comprendre
  • Étape 5: L’incarner, ou le rendre plus vrai que nature
  • Étape 6: La dramaturgie, ou extraire des éléments pour l’histoire

Ce sera l’objet des prochains articles, il est temps de passer à l’exercice!

À vos plumes!

un stylo plume sur une feuille couverte d'écriture
422737 / Pixabay

Je vous propose donc un petit exercice: Relisez votre fiche personnage et essayez de déterminer la part des éléments de «caractérisation» (les détails externes) contre la part de «vrai caractère» (qui il est vraiment). Réfléchissez aussi aux éléments dans votre fiche qui vous permettent de déterminer sa pépite, revoyez votre liste de questions.

Deuxième exercice (oui, je suis méchante aujourd’hui ;): Analysez le héros de votre histoire en cours: quelle est sa pépite? Souvent, elle est là même si nous n’en avons pas conscience. Le problème, c’est qu’elle n’est pas toujours mise en vedette. Quelles sont les scènes qui résonnent avec cette pépite? Quelles sont celles qui n’ont aucun lien? Je ne vous dirais pas de supprimer ces dernières, elles ont sûrement leur utilité. Mais regardez-les quand même dans le blanc des yeux.

OK, deux exercices, cela fait beaucoup, surtout que le deuxième risque de vous perturber (règle d’or, si vous ne savez pas quoi faire, gardez le cap et aller au plus simple 😉 Mais essayez tout de même de mettre en pratique ce que vous apprenez! Entre l’ignorance et la connaissance, il y a un fissure. Entre la connaissance et la mise en pratique, il y a souvent un ravin! Bougez-vous les fesses pour sauter par-dessus!

La suite de la saga sur les personnages est ici:

Rendre vivant un personnage: faire pousser la graine!

PublicDomainPictures / Pixabay
PublicDomainPictures / Pixabay

Voilà! C’était la base du détecteur de métal qui vous donnera la pépite au cœur de votre personnage mais aussi le terreau qui vous permettra de la faire germer. Dans le prochain article, vous trouverez comment utiliser la graine et le terreau pour voir pousser un personnage vivant… Inscrivez-vous sur ma page Facebook ou sur le Twitter pour ne rien rater!

Et n’hésitez pas à me contacter si vous voulez des conseils plus personnalisés ou que je traite une question précise dans un article! Contactez-moi ici…

Bonne chance à vous dans vos projets! ^-^

  • Alors j’ai essayé de faire une fiche personnage pour une de mes nouvelles… Ca m’a complètement démotivé à l’écrire. Elle est en suspens. Peut-être l’intrigue qui ne correspond pas au personnage ou l’univers… J’ai surtout eu l’impression de me mettre des barrières, de bloquer la créativité et la liberté d’expression. De faire un devoir d’école ! Alors j’ai arrêté cette méthode. Par contre pour un roman, il va peut-être falloir que je m’y penche mais je dois d’abord identifier ce qui m’a tellement bloqué dans la fiche. Pas la description physique, c’est permanent. Ca doit être au niveau de la psychologie… Je vais m’y pencher avec du recul, mais encore aujourd’hui (au bout d’1 mois et demi) j’ai dû mal.

    • oui tu as raison. Pour une nouvelle, cette méthode c’est de l’overkill.
      Pour être honnête, même pour un roman cela peut être un peu too much. Le problème est que plus l’on creuse plus l’on risque de se perdre ou de vouloir tout dire.
      Peut être que le background doit être là et qu’il ne faut pas chercher coûte que coûte à l’intégrer dans dans le plan.
      Par contre, j’ai remarquer que si je ne formalise rien, j’ai tendance à oublier de faire appel à la back story pour expliquer les réactions de mon personnage.
      C’est toujours une histoire de trouver un juste milieu entre ce qu’on cérébralise à l’avance et ce qu’on laisse à l’instinct et à l’improvisation.
      J’ai tendance à trop cérébraliser. Non seulement cette méthode ne convient pas à tout le monde mais en plus, même à moi, cela me dessert parfois car je ne laisse plus assez de marge à Muse.
      Bref, tu as raison d’expérimenter. Tu vas trouver ta propre méthode ^-^
      Merci pour ton retour d’expérience <3

  • Si j’ai rédigé des dizaines de fiches personnages pour le roleplay dans ma vie, pour un roman, j’ai du mal ^^’
    Du moins une fiche complète. Je note les points essentiels que je dois utiliser, quant au caractère, en général soit je l’ai bien en tête soit, pas assez et le roman bascule de lui-même dans les méandres de l’oubli au bout de 10 chapitres maximum.

    Ps: je ne parviens à me connecter ni avec WordPress ni Facebook pour les commentaires :'(

    • Hello Gaelle! Merci de ton retour!

      déjà désolée… la technique et moi, cela fait deux oO un plugin a dû sauter…

      oui, pour les fiches personnages, je me rends compte aussi que les miennes sont beaucoup trop longues. Je me suis dernièrement lancée dans l’écriture du bonus de Quand la Pluie Viendra. J’ai si peu de temps, que j’ai refusé de préparer mon histoire, j’y ai été à l’instinct. Résultat, deux personnages se sont créés tous seuls.
      «Génial!» me suis-je dit, avant de me retrouver totalement bloquée quelques milliers de mots plus loin.
      «Bon… je vais les faire ces fiches» me suis-je dit.
      Au final, j’ai commencé mes fiches, par l’essentiel:

      Quel est le thème humain, mythique ou psychanalytique de mon histoire?
      Par rapport à se thème et pour mes deux héros, quel est la vision limitante de la vie?
      Quand est né et comment s’est ancrée cette vision limitante (3 ou 4 éléments de backstory)
      Pour mon héros (et un autre personnage important, si c’est un gros roman ou une saga), que doit-il apprendre? En quoi doit-il changer pour s’en sortir dans l’intrigue externe et/ou être plus heureux?
      Quels événements (surtout quels choix difficiles à faire) le confronteront à sa backstory érronée et lui feront changer sa vision du monde? (les classer du plus anodin au plus puissant pour atteindre la catharsis) (sachant qu’il n’y a pas que les catastrophes qui font changer un personnages, il y a aussi les dilemmes que lui imposent d’autres personnages)

      Et je me suis arrêtée là. Je n’avais pas le temps mais surtout, rien que cela m’a permis de réorienter mon plan et de donner un sens à ce que j’écrivais.
      Après que le perso ait les yeux bleus au débuts de l’histoire et verts à la fin, on s’en fout, cela sera nettoyé à la relecture.
      Enfin, c’est mon avis. Si ces théories t’intéressent, je te conseille de lire Story Genius de Lisa Cron, malheureusement, ce livre n’existe n’est qu’en anglais…